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[comics] Kingdom Come, l’intégrale

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4,6/5

 

Imaginez une Terre et ses habitants hantés par des mythes, des héros déifiés qui se sont retirés et ont, volontairement ou non, laissé la place à d’autres : Superman, Batman, Wonder Woman et consorts n’occupent plus le devant de la scène. Mais ceux qui ont pris leur place, s’ils détiennent des pouvoirs étonnants, ne les utilisent pas avec le respect et le sens du devoir dont faisaient preuve leurs aînés.

 

C’est sur cette Terre-là qu’un homme, héritant des visions d’un illuminé, et réinterprétant les versets de l’Apocalypse, va assister au retour des anciens héros, désireux d’affronter la réalité, de reprendre en mains la destinée du monde et d’éradiquer le mal à sa source, quitte à user des moyens qu’ils récusaient par le passé. Seulement, le remède peut s’avérer pire que le mal et c’est face à leurs responsabilités que se jaugent les vrais héros : malgré tout le pouvoir que Superman a en lui, il sera amené à conclure qu’il ne peut pas résoudre seul tous les problèmes. Comment, dès lors, pourra-t-il supporter cette révélation ?

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Ce récit est une somme qui, dès sa parution, par son ambition et la qualité de ses artistes, est venue directement se placer aux côtés des chefs-d’œuvre d’Alan Moore (1) au panthéon des comics. Ambitieux, bien qu’inégal dans son développement, moins complexe que les Watchmen tout en surfant sur les mêmes principes, aussi respectueux des personnages que le monumental Crisis on Infinite Earths (2) qui avait en son temps redéfini l’univers DC, Kingdom Come est la chronique d’un échec annoncé et baigne ainsi, à l’instar des référents suscités, dans un pessimisme de bon aloi, se plaçant en porte-à-faux avec les idéaux personnifiés par ces héros créés il y a plus de 50 ans. Aujourd’hui, un personnage aux caractéristiques de Superman n’a de valeur que lorsqu’une faille est décelée : il est sinon trop lisse, trop prévisible pour conférer de l’intérêt aux histoires dont il est le protagoniste. Lors, à partir du moment où vous acceptez de le voir descendu de son piédestal, brisé dans sa fierté et son assurance non pas par l’entremise d’un engin de mort, d’un piège à kryptonite ou encore de la magie, mais bien par l’incapacité d’assumer les choix qu’il a dû faire, le scénario devient d’un seul coup plus riche en possibilités.

 

Mais Kingdom Come, ce n’est pas seulement la tentative de héros utopistes de recréer un monde à l’image de ce qu’ils désiraient en faire, mais c’est aussi une galerie de portraits bien connus, avec toute la nostalgie qu’ils inspirent. Et ce Batman cynique, usé mais encore terriblement efficace, a beaucoup en commun avec celui qui nous avait ébloui dans Dark Knight returns, à croire qu’il est des critères qui ne peuvent se redéfinir ad libitum.

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D’autant que c’est Alex Ross qui est aux pinceaux. Dès lors, on passera volontiers sur le manque de lisibilité des scènes de confrontations massives où les héros se distinguent mal des vilains (et il y en a !) : la technique de l’artiste a tendance à homogénéiser les formes, on est loin de la précision méticuleuse de George Pérez qui pouvait nous relater des batailles homériques avec les Avengers où la JLA dans les moindres détails. De même, l’ensemble donne l’impression d’un feuilleton assez lent, alors même que le script est bouillonnant : c’est que Ross peint ses héros, et les dépeint dans des poses hiératiques rendant chaque case digne d’une couverture, voire d’une affiche.

 

En revanche, quel bonheur que ces gros plans sur un Superman au menton carré, aux traits volontaires et au regard perdu. Certains des modèles utilisés sont reconnaissables et cet hyperréalisme donne plus de punch aux dialogues abordant souvent des thèmes profonds (responsabilité – encore ! -, sens du sacrifice, du devoir, loyauté, reconnaissance, solidarité…). Et la Wonder Woman qui nous est présentée a un charme fou, que ce soit dans une tenue proche de celle qui l’a rendue célèbre, ou en guerrière vengeresse en armure : loin des canons présidant encore trop souvent aux proportions idéales des héroïnes, la belle est dotée d’une silhouette ostensiblement féminine et d’un visage fascinant.

 

Bref, une œuvre déjà classique et incontournable. 

  

(1) : dont Watchmen, V for Vendetta, From Hell

(2) : de 1985, écrit par Marv Wolfman et dessiné par George Pérez 

 


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L’intégrale du comic book par Mark Waid & Alex Ross (1996), édité par Semic Books (2004).

 

Traduction : Nicole Duclos.

 

150 pages.

 

Présentation de l’éditeur : Les vieux héros se sont retirés. Superman a disparu. Green Lantern flotte en orbite dans sa cité d'émeraude. Hawkman préserve sa mère la Terre... De nouvelles têtes, fort oublieuses des préceptes de leurs prédécesseurs, font régner la justice en Amérique. Une justice violente, aveugle, revancharde. Magog rassemble autour de lui une cohorte de "vigilants" agressifs dont les combats menacent la vie des gens de la rue. Seul dans sa tour d'ivoire, Superman, devant ses écrans vidéos, regarde le monde sombrer dans un raz-de-marée de haine et de violence. Puis un jour, tout explose...

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<br /> Un article qui donne bien envie de découvrir cette histoire, sachant qu'elle est annoncée en mai chez Urban Comics !<br />
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V
<br /> <br /> Bonne nouvelle ! L'intégrale ne se trouve plus qu'à des tarifs incroyables. Merci d'être passé.<br /> <br /> <br /> <br />